Réconciliation
Honorer les survivants des pensionnats pour autochtones
26 oct. 2022
Le système de pensionnats pour Autochtones a été ponctué de sombres histoires, dont de larges pans ont été dévoilés ces dernières années. Afin de rendre hommage aux survivants, à leur langue et à leur culture, l’artiste et sculpteur Carey Newman (Hayalthkin’geme) a créé la Couverture des témoins, un travail artistique dont chaque objet raconte une histoire, une vérité. TELUS s’associe au Musée canadien pour les droits de la personne et donne une vie numérique à cette œuvre si essentielle.
Une statue brisée récupérée des ruines d’un bâtiment incendié et une paire de vieux patins à glace. Ce sont deux des 800 pièces du passé servant de témoins silencieux pour rappeler l’héritage douloureux lié au système de pensionnats et l’effort systématique pour éradiquer les traditions et identités des peuples autochtones.
Tissées ensemble, ces pièces, provenant de 77 communautés autochtones, composent la Couverture des témoins, une puissante œuvre d’art à grande échelle créée par Carey Newman.
« Dans la tradition orale de mes ancêtres, un témoin joue le rôle important de veiller à ce que rien ne sombre dans l’oubli. Un témoin observe, écoute, puis transmet à d’autres. J’invite tout le monde à devenir des témoins des voix et des souvenirs des survivants », souligne Carey Newman, artiste autochtone.
Selon Lise Pinkos, directrice des programmes du Musée canadien pour les droits de la personne, les expériences vécues dans les pensionnats pour Autochtones sont toutes différentes, et toutes importantes. Il est essentiel de s’informer et de se souvenir.
« On entend souvent les mots « vérité » et « Réconciliation » ensemble. Mais avant de cheminer sur la voie de la Réconciliation, il faut prendre conscience de la vérité : la vérité sur le système mis en place pour supprimer un peuple, sur les traumatismes intergénérationnels, sur ces terres qui ne sont pas les nôtres, sur les mythes qui continuent de circuler. Il faut comprendre le pourquoi », souligne Lise Pinkos, directrice des programmes, Musée canadien pour les droits de la personne.
CAREY NEWMAN — HAYALTHKIN’GEME
Le maître sculpteur Carey Newman est l’auteur de la Couverture des témoins. Le père de l’artiste, qui appartient aux nations Kwakwaka’wakw et Stó : lō (sur le territoire aujourd’hui connu comme la Colombie-Britannique), a survécu aux pensionnats pour Autochtones.
L’artiste explore dans sa pratique artistique les questions autochtones, sociales et environnementales ainsi que les répercussions du colonialisme et du capitalisme. Son œuvre la plus influente à ce jour est sans doute la Couverture des témoins.
Numériser la vérité
La Couverture des témoins a été financée par la Commission de vérité et Réconciliation du Canada, et depuis sa création, en 2014, l’œuvre a fait de nombreuses tournées à travers le pays.
Maintenant, grâce à un don de 1 million de dollars de TELUS, de la Fondation TELUS pour un futur meilleur et de la Fondation de la famille Entwistle, l’expérience de la Couverture des témoins est encore plus accessible et devient numérique. Dans un nouveau format interactif, les utilisateurs peuvent explorer les récits qui témoignent de l’expérience des pensionnats pour Autochtones au moyen de vidéos, d’images, d’entrevues originales et de ressources didactiques.
Le parcours à travers l’œuvre peut nécessiter qu’on revienne vers elle à plusieurs reprises puisque certaines histoires sont particulièrement émouvantes, ou même troublantes.
Lise Pinko évoque notamment les témoignages des survivants en lien avec le bol à bouillie, qui l’ont particulièrement ébranlée. Dans les pensionnats, les enfants comptaient sur les écoles pour répondre à leurs besoins de base, comme les vêtements et la nourriture. Cependant, il n’y avait jamais assez de nourriture, et celle-ci était souvent avariée. « Je pense à ces enfants qui avaient faim et que l’on ne nourrissait pas adéquatement. Les traumatismes de notre passé sont exposés et il ne faut pas s’attendre à tout absorber dès la première visite », dit Lise Pinkos.
Ce patin de hockey provient d’un pensionnat en Saskatchewan. Les sports offraient aux enfants autochtones une pause loin de la négligence et de la solitude. Cependant, le hockey et d’autres sports ont également été utilisés pour les forcer à apprendre les valeurs euro-canadiennes. PHOTO: RORIE MCLEOD
Cette petite statue a été trouvée sur un site de pensionnat en Alberta, couverte de suie et endommagée par un incendie. Elle a été reconstituée pour représenter l’expérience de guérison des survivants, la reconstruction de leurs relations et le renouement avec leurs cultures. PHOTO: RORIE MCLEOD
Deux tresses ont été données par Ellen et Marion Newman. Leur père, Victor, est un survivant dont les cheveux ont été coupés lorsqu’il a été emmené au pensionnat. Ellen et Marion ont voulu honorer le passé de Victor en reprenant la pratique culturelle de couper les cheveux, un geste qui représente le deuil et le respect. PHOTO: RORIE MCLEOD
Gardiens de leurs histoires
L’histoire de la Couverture des témoins n’en est pas à son dernier chapitre. Maintenant que l’œuvre est accessible en ligne, la création prochaine d’expériences de réalités virtuelle et augmentée, grâce au don et à l’engagement de longue date de TELUS envers la Réconciliation, permettra d’accroître le rayonnement de l’œuvre. L’objectif demeure de sensibiliser le plus grand nombre de personnes à cette histoire collective où plus de 150 000 enfants métis, inuit et des Premières Nations ont été arrachés à leur famille et placés dans le système canadien de pensionnats.
« L’innovation technologique et la numérisation de la Couverture des témoins permettent de donner une voix aux survivants partout au pays. Nous sommes les gardiens de leurs histoires, et c’est en parcourant et en transmettant leur vérité que nous pourrons avancer sur le chemin de la Réconciliation », dit Lise Pinkos.
Rencontrez l'auteur
La Presse