Santé
Une thérapie novatrice en réalité virtuelle pour répondre à un besoin grandissant en santé mentale
11 mai 2023
La réalité virtuelle s’est invitée à l’Hôpital d’Alma dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour réduire l’anxiété des patients en psychiatrie grâce à une collaboration entre la
Fondation de l’Hôtel-Dieu d’Alma
, Paperplane Therapeutics
et TELUS.La plupart des gens ayant déjà subi une intervention médicale reconnaîtront qu’il peut être
difficile de gérer
la douleur et l’anxiété, que ce soit durant une simple injection ou une chirurgie. Jean-Simon Fortin
a été témoin de ce défi à de nombreuses reprises au cours de sa carrière comme médecin d’urgence auprès des enfants et des adolescents au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine
. « Les interventions chirurgicales, les injections ou la réparation d’os cassés génèrent beaucoup de douleur et de stress et une gestion inefficace peut conduire à une plus grande appréhension face à de futurs soins médicaux », explique le Dr Fortin, maintenant cofondateur et président-directeur général de
Paperplane Therapeutics
. À la recherche de solutions efficaces pour la gestion de la douleur et du stress chez les patients, le Dr Fortin s’est allié à
David Paquin
, professeur titulaire en création et nouveaux médias à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue. Ensemble, ils ont créé Paperplane Therapeutics, une entreprise qui conçoit des thérapies en réalité virtuelle qui vise à réduire le stress et la douleur chez les patients qui reçoivent des soins et ultimement améliorer leur mieux-être sur le long terme. Ils collaborent avec la Pre Sylvie Le May, professeure titulaire et chercheuse spécialisée en douleur pédiatrique au CHU Sainte-Justine afin de valider cliniquement ces thérapies.Plutôt que d’être dans une salle de traitement à l’hôpital, le patient est plongé dans un environnement calme et apaisant lui offrant un contenu spécialement conçu pour stimuler le cerveau de manière à induire un effet antidouleur et anti-stress. Pour les adolescents et les adultes, un capteur de respiration fixé au casque permet également d’intégrer à la séance des exercices de respiration profonde pour réduire davantage le niveau de stress.
« Si une infirmière doit insérer un cathéter dans une veine, c’est plus facile si le patient est détendu ou si l’attention du jeune est détournée. Le casque entraîne donc un plus grand succès lors des interventions », ajoute le Dr Fortin.
Réduire la prescription de médicaments
L’Hôpital d’Alma utilise les casques de réalité virtuelle dans le cadre d’un projet pilote en santé mentale lancé en 2022 grâce à une collaboration entre Paperplane Therapeutics, la Fondation de l’Hôtel-Dieu d’Alma et TELUS.
« Nous cherchions une façon novatrice de mettre la psychiatrie au goût du jour, et surtout d’avoir un impact positif et concret en santé mentale. J’ai été emballé dès les débuts du projet avec TELUS », affirme Jean Lamoureux, directeur général de la Fondation de l’Hôtel-Dieu d’Alma.
Déjà, les résultats du projet de réalité virtuelle sont positifs.
Le
Dr Luc Cossette
, chef de service en psychiatrie, utilise la technologie de Paperplane Therapeutics en la combinant au traitement par stimulation magnétique
, un processus non invasif de quelques minutes qui vient dépolariser certains neurones dans les cas de dépression grave. « Pour utiliser la stimulation magnétique, il faut d’abord amener le patient dans un état de relaxation. Le casque devient donc l’outil rêvé », souligne le Dr Cossette.
Des études cliniques réalisées au CHU Sainte-Justine ont donné des
résultats concluants
: 80 pour cent des patients ressentaient moins d’anxiété pendant l’intervention médicale, et la douleur était grandement réduite chez 50 pour cent d’entre eux, voire totalement absente chez 30 pour cent des sujets. Autre avantage : la prescription d’antidouleurs et de médicaments contre l’anxiété diminue.Le Dr Cossette a constaté une hausse du nombre de jeunes se présentant à l’urgence depuis l’arrivée de la COVID-19. Selon une
étude de l’Université de Sherbrooke
, près de la moitié des jeunes du Québec montraient des signes inquiétants d’anxiété généralisée en 2021.« Quand on veut aider un patient qui vit de l’anxiété ou de la douleur, peu de méthodes existent. La plus utilisée, c’est la médication. Le problème, c’est qu’elle crée des effets secondaires. La personne peut devenir moins réceptive au traitement, ou plus somnolente, et il peut y avoir un impact sur son sommeil. Avec les casques et la technologie, on va au-delà d’un diagnostic, et on permet au patient de jouer un rôle actif dans son traitement, en réduisant la médication », souligne le Dr Cossette.
Transformer les soins de santé
L’
évolution des réseaux 5G
changera elle aussi radicalement l’expérience de la réalité virtuelle. L’un des plus grands défis actuels est la latence, ou le délai d’envoi et de réception de signaux sur de longues distances, qui peut causer des étourdissements ou des malaises. En traitant les données près des réseaux 5G, grâce à l’informatique en périphérie
, Paperplane Therapeutics et TELUS pourront continuer à faire évoluer la réalité virtuelle pour créer des expériences encore plus immersives, qui permettront aux patients d’interagir davantage avec l’environnement immersif.TELUS teste également des solutions de santé connectées pour relier à distance les premiers répondants aux urgentologues ou pour permettre à un chirurgien de suivre une opération à distance au moyen d’appareils connectés.
Grâce aux investissements de 220 milliards de dollars de TELUS dans ses infrastructures, activités et licences de spectre,
80 pour cent de la population canadienne a maintenant accès au réseau 5G
. De plus, l’entreprise s’active à déployer son infrastructure sur le spectre de 3 500 MHz, qui offrira une réactivité et des vitesses considérablement accrues.L’arrivée de la technologie 5G permettra aussi d’élargir l’utilisation des casques de réalité virtuelle à l’Hôpital d’Alma. Bien que ce soit l’anxiété qui soit à l’étude, le Dr Cossette croit fermement que les technologies et la réalité virtuelle ouvrent une infinité de possibilités en psychiatrie : « La technologie pourrait être utilisée dans des cas de syndrome de stress post-traumatique ou d’anxiété sociale, notamment avec des expositions immersives progressives. Prenez la peur des foules par exemple. Des simulations pourraient se faire graduellement en milieu hospitalier. La seule limite, c’est le programme. »
Aller au-delà du traitement et de la guérison
Récemment, l’équipe médicale d’Alma a accueilli deux autres psychiatres, attirés par les avancées technologiques de l’Hôpital. Les casques de réalité virtuelle viennent également consolider l’offre de soins dans la région.
« Les avantages de ce projet vont bien au-delà du traitement et de la guérison. Avoir des soins chez nous, ça évite d’aller ailleurs pour se faire soigner. La technologie met la région sur un pied d’égalité avec les grands centres urbains. Ça démontre que nous sommes capables d’être avant-gardistes », affirme M. Lamoureux.
À l’avenir, le Dr Fortin espère que ce projet attirera l’attention d’autres fournisseurs de soins.
« Mon désir de m’attaquer à l’enjeu de la douleur et de l’anxiété des enfants nous a permis de créer un environnement dans lequel le patient est confiant, de rassurer la famille et d’améliorer le travail du personnel soignant, indique-t-il. Ce projet à Alma me permet d’exercer mon métier de médecin d’urgence autrement, et de participer à la transformation de la prestation des soins de santé. »