Quand les enfants deviennent du contenu : les risques du surpartage parental
Amanda Lee
Conseillère principale, Programmes, Technologies pour l’avenir🅪 et TELUS Averti🅫
Chaque fois que vous parcourez vos fils de médias sociaux, vous y voyez sans aucun doute des photos d’enfants. Premier jour d’école, vacances d’été, fêtes d’anniversaire, récitals de danse et réunions de famille; la liste est longue.
Le surpartage parental est défini comme suit : « Pratique qui consiste à partager, souvent et en grand nombre, des photos ou des vidéos de ses enfants ou petits-enfants sur les réseaux sociaux. » Dans la plupart des cas, le partage parental est un moyen amusant et interactif d’informer la famille et les amis. Dans d’autres cas, surtout avec la popularité croissante de la culture des influenceurs et de l’économie des créateurs, les enfants sont monétisés et leur utilisation en tant que contenu peut être un moyen de gagner beaucoup d’argent.
Dans les deux situations, le surpartage parental engendre des risques concernant la vie privée des enfants, le consentement éclairé, la sécurité en ligne et la cyberintimidation. Dans cet article, nous explorons quelques statistiques et faits qui pourraient vous surprendre (ou vous choquer) et nous offrons des conseils aux parents pour « partager » de manière plus responsable.
Le surpartage parental en chiffres
Le site Security.org a interrogé 1 000 parents et adolescents aux États-Unis sur leurs habitudes et perceptions en matière de partage parental. Voici ce que le sondage a révélé :
- Plus de 75 % des parents ont déjà partagé du contenu sur leurs enfants
- Plus de 80 % des parents utilisent le vrai nom de leurs enfants dans leurs publications
- Moins de 25 % demandent l’autorisation à leurs enfants avant de faire une publication
- 29 % ne demandent jamais la permission
- Près de 25 % ont des paramètres publics sur leurs applications de médias sociaux (ce qui signifie que n’importe qui peut voir ce qu’ils publient)
- 80 % ont des amis ou des abonnés sur les médias sociaux qu’ils n’ont jamais rencontrés dans la vraie vie
Ces statistiques peuvent sembler étonnantes, or de nombreux parents ne sont pas conscients des risques qu’une publication apparemment innocente peut engendrer.
Les influenceurs s’installent
Alors que de nombreux parents publient du contenu sur leurs enfants exclusivement à l’intention de leur famille et de leurs amis, un secteur tout entier, connu sous le nom de marketing d’influence, a vu le jour. Selon le Influencer Marketing Benchmark Report, le secteur du marketing d’influence se chiffrera à 24 milliards de dollars d’ici la fin de 2024.
Les marques utilisent le marketing d’influence pour créer une communauté et atteindre le public à un niveau personnel. Or, certains parents ont vu là des signes de dollar et sont allés beaucoup trop loin. Par exemple, le New York Times a publié un article sur les « influenceuses » sur Instagram et fait état de mères qui gèrent les comptes de leurs filles. Prenons Elissa comme exemple. Elle gère le compte Instagram de sa fille depuis que celle-ci a 11 ans (selon les règles de Meta, les enfants ne peuvent pas avoir leur propre compte avant l’âge de 13 ans). La fille d’Elissa est mannequin pour des robes de soirée, des vêtements d’entraînement haut de gamme et des léotards de danse. Le compte a gagné en popularité, avec plus de 100 000 adeptes, principalement des hommes. Elissa a même profité de la fonction d’abonnement d’Instagram, facturant 9,99 $ par mois pour des photos exclusives que vous ne verrez pas sur le fil principal.
Tirer la sonnette d’alarme
De plus en plus de gens expriment leur mécontentement, et les enfants en tant que contenu, qu’il s’agisse d’amusement ou de commerce, sont de moins en moins suivis. La chaîne CBC a interrogé plusieurs experts sur les risques liés au surpartage parental. La protection de la vie privée et l’exploitation sont les principales préoccupations soulevées.
Sarah Adams (@mom.uncharted) est déterminée à contrer le surpartage parental et les enfants influenceurs. Elle a récemment lancé kidsarenotcontent.com, dont l’objectif est d’étudier l’incidence du surpartage parental et de plaider en faveur d’une meilleure protection de la vie privée des enfants en ligne.
Sarah est mère de deux enfants de moins de cinq ans et elle ne partage pas de contenu à leur sujet. Selon elle, « le surpartage parental a atteint un niveau inquiétant. Les enfants ont droit au respect de leur vie privée, au consentement éclairé et à la sécurité en ligne ». Elle appelle également les plateformes, les gouvernements et les marques à prendre des mesures pour empêcher que les enfants grandissent dans l’œil du public sans qu’ils le sachent ou sans leur consentement éclairé.
Publier de manière responsable
Selon le site Kids Are Not Content, les enfants ont en moyenne 1 300 photos d’eux qui circulent sur les plateformes de médias sociaux avant l’âge de 13 ans (âge auquel ils sont légalement autorisés à avoir leurs propres comptes). Il est normal de vouloir partager les expériences de sa famille avec ses proches en ligne, mais il est essentiel de le faire de manière responsable et de respecter la vie privée de l’enfant, son droit au consentement et son avenir numérique.
- Demandez la permission à votre enfant : assurez-vous qu’il est à l’aise avec la publication de sa vie en ligne.
- Faites preuve de discernement à l’égard du contenu : demandez-vous si vous vous sentiriez à l’aise si un inconnu voyait votre message, comment les camarades de votre enfant pourraient réagir et quelle pourrait être l’incidence de la publication dans dix ans.
- Évitez les renseignements personnels identifiables : veillez à ce que les photos et les vidéos ne contiennent pas d’informations identifiables telles que des logos d’école, des numéros civiques ou du courrier portant votre adresse.
- Montrez à vos enfants comment se comporter en ligne en leur donnant un exemple positif.
Comme c’est le cas pour toute activité en ligne, il y a des avantages et des risques. Pour que tout se passe bien, il est important d’être attentif et vigilant. Réfléchissez à ce que vous publiez. Si vos enfants sont présents dans le contenu à un moment ou à un autre, discutez avec eux de ce que vous publiez, demandez-leur ce qu’ils en pensent et expliquez-leur clairement comment cela contribue à leur empreinte numérique. Avec votre aide et votre exemple, ils peuvent apprendre à protéger leur vie privée, leur réputation et leur sécurité en ligne.
Pour en savoir plus sur le soutien à apporter aux jeunes dans notre monde numérique, participez à un atelier en ligne de TELUS Averti pour les parents.
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