Donner aux jeunes les moyens de lutter contre la sextorsion

En ce début d’année scolaire, il est important de prendre conscience de la rapidité avec laquelle évolue le monde en ligne dans lequel cheminent vos enfants et vos élèves. Les médias sociaux et les jeux en ligne font partie intégrante de la vie quotidienne des jeunes. En effet, les nouvelles générations se tournent désormais vers ces plateformes pour se construire une vie sociale. Le réconfort qu’elles y trouvent stimule le système de récompense du cerveau qui libère de la dopamine, entraînant des sensations de plaisir et de bonheur. Ces endroits offrent l’occasion de développer ses champs d’intérêt, d’apprendre et d’élargir son cercle social : autant d’aspects importants de l’adolescence. Toutefois, il est essentiel d’informer les jeunes qui vous entourent des risques inhérents à la vie en ligne, nonobstant ses avantages, et de le faire d’une manière qui les interpelle.

L’un des crimes les plus répandus dans l’univers des jeunes est la sextorsion, un type d’exploitation en ligne qui cible particulièrement les jeunes de 14 à 24 ans. Il s’agit d’une forme de chantage où les malfaiteurs manipulent leurs victimes pour obtenir d’elles qu’elles diffusent ou leur envoient des images d’elles-mêmes à caractère sexuel. Ces pédopiégeurs se font passer pour autre que ce qu’ils sont, souvent en se présentant comme des pairs, et sont parfois les premiers à envoyer des photos pour inspirer confiance à leurs victimes. Rapidement, ils augmentent la pression en exigeant des jeunes qu’ils leur envoient plus de contenus sexuels, ou de l’argent, s’ils ne veulent pas que leurs images intimes soient divulguées.

Il est important de comprendre que pour les jeunes en situation d’exploitation, la solution la plus simple n’équivaut pas à opposer un refus catégorique. Prétendre qu’ils n’auraient pas eu à souffrir s’ils avaient simplement refusé d’obtempérer dès le départ est un préjugé néfaste qui alimente une culture de culpabilisation des victimes. Ce faisant, il est difficile d’affirmer avec certitude qu’un jeune n’aurait pas été trompé, car personne d’autre que les victimes ne peut comprendre ce qu’est vraiment cette expérience. Les auteurs de sextorsion utilisent des comptes de médias sociaux crédibles et diverses stratégies qui exploitent la vulnérabilité des jeunes. On pourrait croire que cette expérience est facile à imaginer, mais en être la vraie victime est une tout autre réalité.

Voilà pourquoi il est essentiel d’aller au-delà du concept de « l’inconnu dangereux » pour mieux renseigner les jeunes. Aucun adolescent n’aime se faire dire qu’il ne doit pas faire ceci ou cela en ligne. Simplement leur inculquer que les étrangers sont potentiellement dangereux, c’est ignorer le fait que ces malfaiteurs n’ont souvent rien d’un étranger à leurs yeux. Donnez-leur plutôt l’information qui leur permettra de faire des choix éclairés. Faites en sorte qu’ils puissent reconnaître un comportement manipulateur et montrez-leur comment se sortir d’une situation ou d’une relation inappropriée.

De plus, il serait sans doute bon de les aider à comprendre comment se protéger s’ils décident un jour d’envoyer des photos explicites à quelqu’un. Il ne s’agit pas d’encourager les jeunes à prendre part à ces échanges, mais plutôt de les aider à en limiter les risques, surtout lorsque vous n’avez pas de contrôle sur la situation en tant qu’adulte responsable. Expliquez aux jeunes que s’ils choisissent d’envoyer des images intimes, celles-ci ne devraient pas inclure leur visage ou des éléments corporels susceptibles de les identifier. Invitez-les à désactiver les services de localisation et à utiliser les paramètres de suppression automatique.

S’ils se retrouvent malgré tout victimes de sextorsion, ils ne doivent pas céder aux pressions de l’extorqueur, ce qui pourrait aggraver les choses. Ils doivent faire des captures d’écrans de toutes ces conversations et du compte de l’auteur de sextorsion dans les médias sociaux pour accumuler des preuves. On peut signaler anonymement la sextorsion à cyberaide.ca et à la police locale. Il est crucial de rappeler aux jeunes que jamais les forces de l’ordre ne leur feraient de difficulté ou ne les blâmeraient dans une telle situation. Lorsqu’on signale ce type d’incident, on aide à y mettre fin. Cela peut même parfois empêcher l’agresseur de faire d’autres victimes. Si le contenu à caractère sexuel a été mis en ligne, vous pouvez le signaler à AidezMoiSVP.ca pour essayer de freiner sa diffusion et de le faire retirer. Par ailleurs, si des personnes que vous connaissez voient ce contenu, vous pouvez prétendre qu’il s’agit d’un hypertrucage généré par intelligence artificielle, puisqu’il est tout à fait possible maintenant d’intégrer votre visage et votre voix à des vidéos frauduleuses créées à l’aide de l’IA.

Nous savons qu’en matière de sécurité numérique, ce sont surtout les jeunes filles qui sont mises en garde contre les dangers de partager des photos intimes. Socialement, nous sommes conditionnés à percevoir les femmes comme de potentielles victimes de prédateurs masculins. De fait, nous cherchons davantage à enseigner aux filles comment se protéger. Cependant, selon cyberaide.ca, 90 % des victimes lors de signalement de sextorsion sont des hommes. Les jeunes garçons sont souvent victimes de sextorsion financière, alors que les malfaiteurs (qui peuvent se faire passer pour des filles) exigent de l’argent en les menaçant de diffuser les photos intimes qu’ils ont obtenues. À titre d’éducateurs et de tuteurs, il est impératif que vous mettiez l’accent sur ces mesures de prévention auprès de tous les jeunes, quel que soit leur sexe. L’empathie et l’éducation sont les premières étapes de la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants. Testez vos connaissances et apprenez-en davantage en répondant à ce questionnaire.